AVOIR ET ÊTRE
La rentrée scolaire est faite. Pour de nombreux écoliers, collégiens et même lycéens la conjugaison des verbes est un véritable pensum. Traditionnellement, on commence par être et avoir. Ces verbes ne s’accordent pas parfaitement, leur passé est composé et leur futur imparfait.
Savourons les paroles de la chanson d’Yves Duteil. Puisse-t-il donner un peu d’avoir à notre Être.
Gérard 15 / 9 /2
Yves DUTEIL
Loin des vieux livres de grammaire,
Écoutez comment un beau soir,
Ma mère m'enseigna les mystères
Du verbe être et du verbe avoir.
Parmi mes meilleurs auxiliaires,
Il est deux verbes originaux.
Avoir et Être étaient deux frères
Que j'ai connus dès le berceau.
Bien qu'opposés de caractère,
On pouvait les croire jumeaux,
Tant leur histoire est singulière.
Mais ces deux frères étaient rivaux.
Ce qu'Avoir aurait voulu être
Être voulait toujours l'avoir.
À ne vouloir ni dieu ni maître,
Le verbe Être s'est fait avoir.
Son frère Avoir était en banque
Et faisait un grand numéro,
Alors qu'Être, toujours en manque
Souffrait beaucoup dans son ego.
Pendant qu'Être apprenait à lire
Et faisait ses humanités,
De son côté sans rien lui dire
Avoir apprenait à compter.
Et il amassait des fortunes
En avoirs, en liquidités,
Pendant qu'Être, un peu dans la lune
S'était laissé déposséder.
Avoir était ostentatoire
Lorsqu'il se montrait généreux,
Être en revanche, et c'est notoire,
Est bien souvent présomptueux.
Avoir voyage en classe Affaires.
Il met tous ses titres à l'abri.
Alors qu'Être est plus débonnaire,
Il ne gardera rien pour lui.
Sa richesse est tout intérieure,
Ce sont les choses de l'esprit..
Le verbe Être est tout en pudeur
Et sa noblesse est à ce prix.
Un jour à force de chimères
Pour parvenir à un accord,
Entre verbes ça peut se faire,
Ils conjuguèrent leurs efforts.
Et pour ne pas perdre la face
Au milieu des mots rassemblés,
Ils se sont répartis les tâches
Pour enfin se réconcilier.
Le verbe Avoir a besoin d'Être
Parce qu'être, c'est exister.
Le verbe Être a besoin d'avoirs
Pour enrichir ses bons côtés.
Et de palabres interminables
En arguties alambiquées,
Nos deux frères inséparables
Ont pu être et avoir été.
LES AFFRES DE LA RENTRÉE
En cette période, il n’est question que de rentrée. En septembre, nous éprouvons le vertige de la page blanche comme si les soucis d’hier s’étaient envolés ; nous nous sentons tout neufs, très printaniers, presque primesautiers ; nous redevenons l’enfant que nous étions, pleins d’enthousiasme, prêts à décrocher la lune.
Alors, pour éviter le stress et pouvoir se maintenir frais et dispos, nous prenons courageusement des résolutions en affichant la volonté de les tenir : dormir au moins 7 heures par nuit, faire un bon quart d’heure de méditation ou de yoga chaque matin, pratiquer régulièrement un sport pour surveiller sa ligne, prendre plus souvent le vélo que la voiture, s’investir dans une association à caractère social, se préserver des moments pour s’enrichir culturellement, souscrire un abonnement à une revue scientifique et s’efforcer de la lire de a à z, se documenter sur l’intelligence artificielle, aller au moins une fois par semaine au cinéma, au théâtre, visiter des musées, s’approvisionner dans les boutiques bios servant des produits locaux, confectionner de nouvelles recettes, se garder le mercredi pour accompagner les enfants dans leurs activités extra-scolaires, se donner du temps le week-end pour jouer avec eux, téléphoner régulièrement à ses vieux parents et aux connaissances esseulées, et, enfin, apprendre par cœur la fable de La Fontaine « La Grenouille qui veut se faire aussi grosse que le Bœuf »
Gérard
01/ 09/ 23
Pour cet été, je vous livre un poème de Jacques PREVERT.
Nous nous retrouverons en septembre Gérard
Soyez polis
Jacques Prévert
Il faut aussi être très poli avec la terre
Et avec le soleil
Il faut les remercier le matin en se réveillant
Il faut les remercier
Pour la chaleur
Pour les arbres
Pour les fruits
Pour tout ce qui est bon à manger
Pour tout ce qui est beau à regarder
A toucher
Il faut les remercier
Il ne faut pas les embêter… les critiquer
Ils savent ce qu’ils ont à faire
Le soleil et la terre
Alors il faut les laisser faire
Ou bien ils sont capables de se fâcher
Et puis après
On est changé
En courge
En melon d’eau
Ou en pierre à briquet
Et on est bien avancé…
Le soleil est amoureux de la terre
La terre est amoureuse du soleil
Ça les regarde
C’est leur affaire
Et quand il y a des éclipses
Il n’est pas prudent ni discret de les regarder
Au travers de sales petits morceaux de verre fumé
Ils se disputent
C’est des histoires personnelles
Mieux vaut ne pas s’en mêler
Parce que
Si on s’en mêle on risque d’être changé
En pomme de terre gelée
Ou en fer à friser
Le soleil aime la terre
La terre aime le soleil
C’est comme ça
Le reste ne nous regarde pas
La terre aime le soleil
Et elle tourne
Pour se faire admirer
Et le soleil la trouve belle
Et il brille sur elle
Et quand il est fatigué
Il va se coucher
Et la lune se lève
La lune c’est l’ancienne amoureuse du soleil
Mais elle a été jalouse
Et elle a été punie
Elle est devenue toute froide
Et elle sort seulement la nuit
Il faut aussi être très poli avec la lune
Ou sans ça elle peut vous rendre un peu fou
Et elle peut aussi
Si elle veut
Vous changer en bonhomme de neige
En réverbère
Ou en bougie
En somme pour résumer
Deux points ouvrez les guillemets :
«Il faut que tout le monde soit poli avec le monde ou alors il y a des guerres… des épidémies des tremblements de terre des paquets de mer des coups de fusil…
Et de grosses méchantes fourmis rouges qui viennent vous dévorer les pieds pendant qu’on dort la nuit. »
Dieu a délivré un contrat de confiance.
Peut-être, vous en souvient-il, autrefois, au cours des vêpres (?), les fidèles reprenaient en chœur une invocation latine que l’on pourrait traduire par «Cœur Sacré de Dieu, j’ai confiance en vous ». D’où provient cette assurance ? Les archéologues ont découvert, il y a peu de temps, enfouie sous le Mont Sinaï, une pierre gravée. Elle fut donnée par Dieu à Moïse qui dans sa précipitation à redescendre pour montrer les tables de loi aux Hébreux, l’a tout bêtement oubliée. Nous connaissons les dix commandements, mais à côté, Dieu, en tant que créateur bénévole, s’était engagé un peu plus et il avait proposé à Moïse un « contrat de confiance ».
Que contient ce fameux contrat ?
-Garanties « Pièces et main d’œuvre »
« S’il est constaté une malformation, un dysfonctionnement, un vice caché, Dieu s’engage à refaire l’humain. Cette garantie s’applique indépendamment de la durée de vie de l’espèce humaine. Cette re-création s’inspirera du modèle initial et bénéficiera de l’avancement des dernières techniques et permettra de corriger certaines imperfections ou maladresses constatées sur la première version dues à un excès de précipitation divine. Le vieux modèle qui ne sera pas repris, éteint toute obligation de la part du créateur. La nouvelle version, une fois tous les anciens articles devenus inutiles et tombés en désuétude, prendra la place de la première génération des êtres humains.»
Attention, il faut lire les lignes en bas en petits caractères : « N’entre ni dans l’objet ni dans la nature du contrat, l’assurance des dommages ou responsabilités ayant pour origine un défaut d’entretien ou de réparation incombant à l’assuré, caractérisé et connu de lui, toute mauvaise utilisation du produit, par exemple, et non exclusivement, la manipulation d’atomes entraînant des mutations explosives, la détérioration volontaire ou accidentelle de l’environnement".
- Informations sur le produit
« A propos des questions fondamentales : « Qui sommes-nous, Où allons-nous ? Quelle est notre destinée ?» Dieu s’engage à répondre à tout heure du jour et de la nuit. Pour éviter les délais trop longs de connexion : « Tapez 1…, tapez 2... » Dieu inspire directement des poètes, des penseurs philosophes, ou encore des prophètes. Pour décrypter leurs enseignements, chacun doit se munir d’un dictionnaire biblique et d’une âme pure.»
Indice de réparabilité
« Chaque être humain émet une lumière dont la mesure du rayonnement indique l’état d’usure. En cas de dysfonctionnement même léger, un bip alerte la conscience. Le mode d’emploi joint au produit indique la marche à suivre pour remettre en état l’être humain, en fonction du degré d’usure.»
- Conseils sur l’utilisation du produit
« Deux catégories coexistent :
Conseil individuel,
La prière permet de recevoir des conseils personnalisés. Elle peut être adressée indifféremment à l’une des trois personnes trinitaires ou transiter par la Communion des Saints qui, en principe, transmet. Pour que la prière soit examinée elle doit accompagnée d’un CV (Cœur Vrai). Il est précisé que prière examinée ne signifie pas prière exaucée. Par suite d’encombrements prévisibles, les délais d’attente peuvent dépasser plusieurs années.
Conseil sur place
Par suite de mauvaises utilisations du produit et les risques de détérioration encourus, Dieu lui-même s’est déplacé par l’intermédiaire de son Fils. Il a fait une démonstration éclatante aux humains, devenant lui même simple article, leur montrant la bonne utilisation du produit.»
Dénonciation du contrat
« Dieu s’engage à ne pas dénoncer le contrat, engagement consigné auprès de Noé. Par contre, à chaque instant, l’humain, individuellement ou collectivement, peut résilier totalement ou en partie ce contrat de confiance. Dans ce cas, toute protection cesse ipso facto.»
Certains esprits bien intentionnés ont proposé un avenant au contrat, une sorte d’assurance tous risques : « Dieu interviendra d’une manière directe avec ses légions d’anges quand l’humain dans son ensemble sera menacé de disparition.» Dieu a sèchement refusé précisant que c’est un contrat, qu’il faisait parfaitement confiance à l’humain et qu’il attendait la réciprocité manifestée par la répétition à satiété : «Cœur Sacré de Dieu, j’ai confiance en vous.»
Gérard
1 juin
LES NOUVEAUX MOTS DE LA RETRAITE
Environ 150 mots sont entrés dans le dictionnaire Le Robert édition 2024.
A l’occasion de l’épisode des retraites (qui n’est pas terminé) on peut évaluer la récolte de nouveaux mots qui ont fait florès dans les rencontres amicales ou les dîners de famille.
D’abord le 49,3. Il est devenu tellement banal qu’on en oublie qu’il est un article de la constitution. C’est un mot redoutable. Pour un enfant turbulent, c’est synonyme de gros yeux ou de piquet : « si tu n’es pas sage, je sors mon 49,3 ». En classe, le professeur qui menace les élèves indisciplinés de son 49,3, obtient immédiatement le silence.
Ensuite, « conseil constitutionnel » est présent dans la conversation. C’est une sorte d’arbitre. Il manie le carton jaune ou le carton rouge. Un peu à la manière des joueurs d’un match de foot se tournant vers l’arbitre pour qu’il sanctionne une faute de l’adversaire, l’opposition brandit une loi avec un argumentaire pour que le conseil constitutionnel réagisse. A la différence de l’arbitrage sportif, nul ne peut critiquer la décisions des neufs sages et il n’y a pas de vidéo.
Le RIP Référendum d’Initiative partagé. Avant, les débats sur les retraites, personne ne savait qu’il existait. C’est le principe « on a perdu une bataille, mais pas la guerre » Là encore la décision appartient aux membres du conseil constitutionnel de lancer une procédure pour collecter quelques 4,8 millions de signatures dans un délai de 9 mois. Après cette période de gestation, le nouveau-né peut apparaître, mais il est chétif et fragile et n’a pas le pouvoir de tout chambouler. Le RIP est le dernier espoir vers lequel on se tourne quand on a épuisé tous les recours.
Grâce à la discutions de la réforme des retraites, le public connaît mieux les institutions de la république et acquiert ainsi une maturité citoyenne. Mais que se passe-t-il ? On n’entend plus rien sinon un concerto en sol majeur : les casserolades deviennent assourdissantes.
Gérard
12 mai
AU RESTAURANT
Depuis quelques années, un virus envahit nos vies, notre quotidien, nos amis, nos familles, nos cercles relationnels : nous sommes accablés par les « sans » : sans-papiers, sans emploi, sans domicile fixe, sans ressources, sans-grade, sans-dents.
Le pire se lit dans les slogans publicitaires à propos des aliments, jugez plutôt : « sans gluten, sans lactose, sans glucides, sans alcool, sans céréales, sans additif, sans huile de palme, sans FODMAPs, sans sucre, sans nitrite à base de plantes et d’extrait de levure, sans lectines, sans sel, sans gras, sans conservateur »
Entre amis, nous sommes allés dans un restaurant végétarien, l’estomac dans les talons, et nous comptions bien tailler une bavette et, éventuellement, discuter le bout de gras. Nous avons fait chou blanc, nous nous sommes fait rouler dans la farine, loin d’être aux petits oignons, nous n’avons pu mettre du beurre dans les épinards et arrivés très vite à la fin des haricots nous n’avons même pas gardé une poire pour la soif. Pas étonnant, si en sortant, nous n’étions pas dans notre assiette avec l’amère impression d’avoir été les dindons de la farce.
L’ensemble nous est apparu insipide, inodore et sans saveur ; en définitive, seule l’addition fut salée.
Gérard
De la Toussaint à Pâques
Quand on évoque un « vrai temps de Toussaint », on imagine pluie, vent, ciel bas. Le moral est en berne, le souvenir douloureux des trépassés est en phase avec la météo, tous les arbres côtoyant les cimetières, semblent des saules pleureurs.
Notre monde semble se calquer sur la végétation : les bourrasques du vent de la guerre déferlent sur nos vies, renversant les aspirations à la liberté en Ukraine, en Iran et ailleurs. Les Poutine et les Xi Jinping, tels des cumulonimbus menaçants, règnent en maîtres. Les migrants s’embarquent vers l’inconnu affrontant mille écueils. Oui, nous pouvons être pessimistes lorsque le réchauffement climatique est en train de martyriser la planète.
Et pourtant…
Sous le règne de César Auguste, un enfant est né, totalement ignoré dans l’épaisseur d’un bourg parfaitement inconnu.
En janvier, sous la neige et le givre, la végétation semble morte, la terre se terre dans son giron sous le regard des étoiles que la morsure du froid rend encore plus brillantes et lointaines.
Mais on remarque imperceptiblement que les jours ne baissent plus, mieux, la clarté grignote peu à peu la nuit.
Après trente ans de vie cachée, Jésus reçut le baptême de Jean. Puis, après l’arrestation du baptiseur, Jésus partit pour la Galilée, redonnant confiance aux désespérés, guérissant les blessés de la vie, défendant les exclus, valorisant les femmes dans un contexte de misogynie, blâmant, fustigeant et condamnant les prêtres du temple, hommes du sacré imposant à tous, le joug d’une loi présentée comme divine. Les riches d’argent, de pouvoir et les imbus d’eux-mêmes, en connivence avec les esprits mauvais, sentirent les premiers que cet homme était dangereux : n’allait-il pas jusqu’à bénir des enfants, guérir le serviteur d’un soldat romain et la fille d’une étrangère, demander de l’eau à une Samaritaine en lui révélant que Dieu n’habite pas dans le temple de Jérusalem mais dans le cœur de chacun, et, suprême affront, jusqu’à désacraliser le sabbat ?
Il dérangeait trop. Après l‘avoir mis à mort, les hommes l’avaient emmuré, caché, gardé. Ainsi, il retournerait définitivement à la terre, définitivement écarté, définitivement poussière ; son cas, définitivement réglé. Pour ses disciples qui avaient cru en lui et s’étaient enfuis lamentablement, c’était la froidure perpétuelle, la nuit éternelle, le ciel éteint à tout jamais, sans lueur, sans passé, sans espoir.
La pierre a été roulée, c’était une pierre d’une grande taille, précise l’évangéliste Marc. Il n’est plus là. La VIE a surgi là où personne ne l’attendait, où nul n’espérait. Le tombeau définitivement ouvert, éternellement ouvert sur l’inattendu, sur l’inouï, sur tous les possibles, rendant possible la quête de l’impossible.
Actuellement, il réside en Galilée donc chez nous. Il est présent dans notre quotidien, il vit notre condition de femme et d’homme, il partage nos peines, nos souffrances, nos attentes, nos rires, nos mains tendues, nos bras ouverts. Bien sûr, ni la faim ni la guerre n’ont disparu mais la tristesse n’est plus de mise : le mur de la mort a été pulvérisé, Jésus l’a traversé entraînant toute l’humanité avec lui.
Oui, à la Toussaint, les cimetières ensemencés d’immortelles, respirent la VIE.
Gérard
3 avril
EN QUÊTE DE SENS
Qui sommes-nous ? D’où venons-nous ? Où allons-nous ? Ces trois questions existentielles taraudent depuis toujours l’esprit des humains. Bien sûr, à la manière de Pierre Dac, nous pourrions répondre : « Je suis moi, je viens de chez moi et j’y retourne !» Mais plus sérieusement : la vie a-t-elle un sens, l’évolution de notre société n’est-elle pas « in-sensée », pourquoi la mort est-elle un contresens ? A force d’explorer tous les recoins de ces questions, nous finissons par tourner en rond, déboussolés, perdant ainsi, le peu de bon sens qui nous reste.
Nous sommes immergés dans le temps ; le temps qui s’écoule a-t-il un sens ? Certaines heures, plus sombres les unes que les autres, n’en finissent pas tels des omnibus cahotant égrenant le chapelet des stations et les mystères du quotidien blafard et ennuyeux. D’autres heures sont lumineuses « à la bonne heure » dit-on, mais pareilles à un TGV, elles passent sans s’arrêter. Pendant ce temps, l’heure tourne et la dernière heure est vite arrivée avec sa minute de vérité indiquant la sortie, sans jamais avoir pris le temps de nous expliquer pourquoi sommes nous entrés dans la danse.
Faut-il chercher le sens dans l’histoire ? Hélas, penser que l’histoire a un sens, c’est juger, en dépit du bon sens, que le navire de l’humanité avance dans la bonne direction. Or, il n’y a pas de capitaine à bord, c’est Mammon le grand ordonnateur des manœuvres, le bateau fonce à toute vapeur vers les icebergs du réchauffement climatique et de la pollution, les premières classes logées dans leurs cabines de luxe empêchent les miséreux cantonnés dans l’inconfort et la disette de monter sur le pont du développement et les cales recèlent des bombes prêtes à exploser. Les prophètes, les poètes et les âmes pures se fiant aux étoiles, hurlent au casse-cou, implorent de ralentir et de changer de cap, mais personne ne les écoute ou, pire, on les bâillonne.
Peut-être, pour trouver le sens, faut-il allumer la bougie de l’espérance. Alors la réalité se transforme : des champs de bataille s’envolent des colombes, les blessés de la vie sont apaisés par le miel de la tendresse coulant de la ruche des regards des soignants, la mort même, quittant ses oripeaux de frayeur et revêtant ses ornements couleurs arc-en-ciel, montre l’arbre de Vie.
Chercher le sens, non pour le découvrir – qui peut se targuer de connaître le sens, sinon celui du ridicule - mais pour prouver que cette recherche a du sens. Donc, comme on le répète à satiété dans les saints lieux, l’important, c’est moins la quête de sens que d’avoir le sens de la quête.
Gérard
COMPTAGE DES MANIFESTANTS
Les manifestations contre la réforme des retraites battent leur plein, et ce n’est peut-être pas terminé. Chaque fois, nous sommes intrigués par un problème d’arithmétique. Comment compter les personnes qui défilent sans se tromper ? Chacun remarque l’écart entre les chiffres avancés par les syndicats et ceux donnés par la police ? Pourquoi cette différence pouvant aller parfois du simple au double ? Nous pensons avoir trouvé la solution : tout vient d’une anticipation grossière.
Le syndicaliste rempli de fougue et d’enthousiasme veut naturellement enrôler le plus de monde possible sous sa bannière ; s’adressant à un ami ou un camarade de travail, il lui dit : « Pour la manif, nous comptons sur toi » et... il l’intègre dans le comptage final.
A l‘inverse, le commandant chargé de la bonne tenue de la manifestation demande à ses subordonnées si les responsables de la sécurité désignés par les syndicats sont fiables, il lui est répondu : « Ne comptez pas sur eux »
Voici donc l’explication : certains comptent ceux qui restent chez eux, d’autres ne comptent pas ceux qui marchent.
Gérard
RETRAITE
Si vous avez des invités et que vous manquez de sujets de conversation, osez la retraite. La retraite, quel bel espace de dialogue et de joutes verbales ! Quel travail, quelle pénibilité pour essayer d’harmoniser les points de vues, que d’heures passées en discussion. Chacun a son point de vue, ils sont irréconciliables. Pour que les protagonistes se mettent d’accord, il faudra sans doute, deux ans de plus...
Le gouvernement veut accélérer l’examen du projet de loi en évitant toutefois d’appuyer sur le champignon du 49,3 qui peut provoquer des dérapages incontrôlés, mais insidieusement, et paradoxalement, il envisage d’aller plus vite encore, à la vitesse de 47,1 ! En effet, si l’exécutif utilise l’article 47,1 de la constitution, les débats ne dureront que 50 jours. L’opposition parlementaire, vent debout sur son 31, tentera alors de freiner des quatre fers et exigera que le texte soit... retraité.
Les cortèges revendicatifs battant le tambour et le rappel, espèrent que l’assemblée nationale mettra le projet de loi...en retrait ; quant au pouvoir ministériel, il compte que les manifestants après avoir battu le pavé, battront... en retraite.
Gérard
JANVIER, LE MOIS DES VIEUX
En ce début d’année, je vous présente mes meilleurs vieux. Bien sûr, je suis un peu en retard mais la froidure de la saison interdit de sortir les vieux par n’importe quel temps, de plus, il est nécessaire qu’ils portent écharpe, bonnet et gants, et qu’ils soient vaccinés contre le COVID et la grippe. En fait, ces précautions sont inutiles car mes vieux sortent de l’ordinaire.
Vous le voyez, ils ont fière allure, ces vieux de plus en plus jeunes, prêts à partir en voyage, faisant la java jusqu’à point d’heure sans se soucier de la permission de minuit, allant jusqu’à conter fleurette aux belles en quarantaine….
Et que dire des vieux de la vieille ? Ils ont bourlingué, roulé leur bosse partout, remplis d’expérience et de sagesse, ils avancent avec confiance dans l’avenir et dévore le présent et sont très utiles pour remonter le passé. Demandez leur s’ils se souviennent d’avoir vu un mois de décembre si doux, ils vous répondront que de mémoire de plus vieux du pays ils n’ont jamais vu un décembre pareil depuis le début de leur carrière de plus vieux du pays.
L’autre jour, j’ai rencontré un ami et lui ai demandé : « Comment vas-tu ? » Il m’a répondu : « Comme les vieux ». Alors je lui ai dit : « Je suis content car tu vas vraiment très bien ».
Gérard
BON NOËL-AN
Il est né sous l’occupation romaine, les habitants de la Galilée aspiraient à la liberté comme ceux d’Ukraine aujourd’hui. Les César Auguste et les Hérode, les Poutine et les Xi Jinping règnent en maîtres. Les migrants, victimes de persécutions ou de dérèglement climatique s’embarquent vers l’inconnu affrontant mille écueils, comme jadis, ce couple de Nazareth en partance vers Bethléem. Marie et Joseph devenus demandeurs d’asile, sont rejetés vers un ailleurs incertain et, chez nous, les SDF squattant des logements inoccupés sont poursuivis par la justice et risquent la prison. Une voix dans le désert commandait de partager avec celui qui a faim, en 2021–2022, plus d’un million de personnes se sont pressées aux restos du cœur. La-bas, les anges chantent les louanges d’un nouveau-né et, ici, des consacrés défigurent des visages d’ange. Le peuple d’Israël attend un sauveur et notre planète n’en peut plus de gémir, elle attend que les hommes viennent à son secours.
Un enfant vulnérable est né ; des bergers, ces moins que rien, se dérangent pour lui apporter leur obole de guetteurs d’aurore, des étrangers se « dés-orientent » volontairement, errants obstinés, ils suivent l’étoile de la connaissance. La flammèche allumée dans le giron de Marie, grandit, se propage, embrase toute la terre. L’amour ruisselle comme les fleuves de Babylone et se divinise dans les eaux du Jourdain.
Mais la Bête rode : Mammon et ses sbires du CAC40 occupent le terrain, brisent la confiance, sapent la courtoisie, éteignent la soif, noircissent la mémoire, enlaidissent le passé, ensevelissent la beauté, enrayent l'enthousiasme, emprisonnent l’espérance.
En 2023, la lumière restera-t-elle sous le sapin ? Notre monde frissonne, malade, en proie à la désespérance, que la clarté de Noël vivifiante, vaillante et audacieuse qui frémit et palpite en nous, l’ensoleille !
Gérard Cordier